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Réinventer des combles

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Comment un impératif technique peut être l’occasion de repenser la façon d’habiter sa maison, et d’offrir un rapport renouvelé à l’extérieur : ici, des travaux de réfection de la couverture étaient nécessaires. Mais cette maison familiale, accueillant trois générations, étant difficile à chauffer, décision était prise d’isoler simultanément la toiture.

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Seulement, les combles étant déjà très bas, l’espace aurait été rendu difficilement habitable sans un rehaussement général de la toiture, incertain dans ce site classé et nécessitant de reprendre le plan de l’étage.

Le projet s’est donc développé dans deux directions : faire valider la possibilité de rehausser le volume auprès des Bâtiments de France et proposer une façade harmonieuse, et développer un aménagement intérieur lisible malgré les contraintes de l’existant.

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La nouvelle toiture est calée sur le volume voisin, ce qui permet d’absorber visuellement les adossements environnants, offrant une perception plus harmonieuse de l’îlot. Les moellons de calcaire issus de la démolition des refends intérieurs sont réemployés pour rehausser la façade, un rejointoiement général achevant d’unifier l’ensemble.

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Lormée01L’expression contemporaine, sur cette façade très marquée par une restauration dans un esprit « Arts & Crafts » durant l’entre deux guerres, se limite aux menuiseries des nouvelles ouvertures, anticipant un futur remplacement des menuiseries existantes.

A l’intérieur, en revanche, l’ensemble du cloisonnement est repris à neuf afin d’habiter différemment les combles : de vraies fenêtres offrent enfin des vues sur le paysage remarquable, le couloir est redressé, offrant un cheminement lisible, éclairé naturellement par des prises de lumière au sommet de la toiture. Un accès à un vaste grenier alors inaccessible permet d’envisager de futurs projets.

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Malgré la modestie des surfaces, le travail en volume offre un nouveau paysage intérieur : animé par les différences de niveaux existantes, le cheminement se glisse entre les volumes des chambres et de la mezzanine. Ceux-ci apparaissent comme des maisonnettes d’aspect varié, agencées sous la protection de la toiture : c’est le domaine des petits-enfants.

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Mission réalisée : Mission complète

Graines d’Envies, habitat participatif

Un large groupe d’habitat participatif, de 11 foyers, nous a sollicités, moi et deux consœurs (Alexia Valdès et Marine Barbe), pour étudier la faisabilité de leur projet sur une commune iséroise.

Le lieu est une ancienne et vaste propriété, constituée d’une maison de maître avec ses commodités (piscine, tennis, parc…) d’une part, et d’une vaste grange en pisé et d’une fermette rassemblées autour d’une cour, d’autre part. Ce sont ces deux derniers bâtiments qui sont destinés à accueillir le groupe, la maison de maître étant envisagée comme un logement-tampon, puis à terme comme un lieu d’accueil.

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Une position dominante mais à l’orée d’une crête boisée, une implantation parallèle des deux bâtiments qui dessine une séquence paysagère qui cascade de la lisière boisée au village, en passant par le cœur du site Au-delà des protections patrimoniales réglementaires en vigueur sur le site… le lieu possède de vraies qualités paysagères et constructives qui lui donnent son identité. L’implantation perpendiculaire à la pente et l’orientation solaire sont intéressantes, tout comme le préau de la ferme, placé en balcon sur la vallée.

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Mill-03En regard des deux grands bâtiments en pisé qui structurent le site, le pavillon du bûcher apparaît comme un objet architectural singulier, en point de mire depuis l’entrée de la cour. Sa visibilité, son vis-à-vis avec les pignons amont des deux bâtiments, son altitude correspondant à celle de la zone de baignade, sa situation à mi-distance de la forêt incitent à s’appuyer sur ce pavillon pour articuler l’aménagement du site.

En effet, investir ce pavillon et son esplanade comme lieu de convergence du site, en y développant par exemple une cuisine commune, une bibliothèque, l’accueil d’activités de groupe… permet d’organiser clairement les fonctions sur le site, dans une approche permaculturelle :

• Les lieux partagés se connectent alors directement à ce cœur de site : étage de la grange (lieu de travail partagé, salle de réunion, hébergement ?), dernière travée de la ferme (maison d’hôtes ?), zone de baignade existante et ses pavillons. L’ensemble dessine une nouvelle circulation structurante, allée paysagère bordée d’espace productifs partagés ou privatifs, qui s’étire jusqu’à une zone de lagunage et de compostage au nord du site.

• En contrebas, les habitations s’ouvrent de plain-pied au niveau de la cour, qui joue le rôle de « vestibule » semi-privatif. Seule la boulangerie, sous le préau de la ferme, s’affiche en accroche sur la route communale, à proximité immédiate du stationnement.

• En contrehaut, une prairie bordée de fruitiers constitue un espace de jeux visible du cœur de site, et une invitation vers la forêt toute proche.

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A  Chemin communal – se relier au territoire
B  Promenoir collectif – partager avec les autres
C  Sentier forestier – être avec soi
1  Seuil belvédère : stationnement
2  Accroche sur la voie publique : boulangerie
3  Vestibule : cour d’entrée semi-privative
4  Cœur du site : place haute à la croisée des circulations, avec le pavillon commun : cuisine,
convivialité, bibliothèque, jeux…
5  Verger-prairie de jeux, échappée vers la forêt…
6  Coteau productif à portée de vue depuis l’allée : potager, petits fruits… collectif ou en parcelles
7  Zone lagunage et compostage, possibilité d’un relevage pour l’arrosage des jardins
8  Zone détente autour du bassin renaturé, exposition solaire…
9  Ancienne ferme, dédiée à l’habitat. Possibilité d’une connexion directe sur l’allée commune en
partie amont, pour des fonctions partagées (maison d’hôtes ?).
10  Ancienne grange, dédiée à l’habitat dans la partie pisé. La partie sous charpente directement
connectées au cœur du site, est consacrée à des fonctions collectives (coworking, salle de
réunions, quelques hébergements?) avec une vue sur le village à l’ouest.
11  Ancienne maison de maître, à programmer autour de l’accueil touristique, des formations et
événementiels thématiques. Problématique ERP à traiter.

Mission réalisée : Etude d’Esquisse

Un balcon sur Belledonne

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Deux familles souhaitaient trouver un lieu pour s’établir, l’une d’elles souhaitant avoir suffisamment de terrain pour développer un projet nourricier en permaculture. Une ancienne demeure dauphinoise, sur les contreforts de le Chartreuse, leur offrait cela et bien davantage : un bâti de caractère environné de terres agricoles, peu de voisinage tout en étant proche des axes de circulation et des services, et surtout un majestueux panorama sur la chaîne de Belledonne.
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L’unique accès à la propriété s’effectue depuis le chemin communal en contre-haut, nécessitant une volumineuse rampe aménagée à l’est des bâtiments. Une longue allée en terrasse, bordée par un mur de pierre, mène de là jusqu’à la grange, offrant aux bâtiments leur beau travelling sur le panorama.

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Une des familles investira l’ancienne grange, visible ici au fond, tandis que celle que j’ai accompagnée s’installera dans l’ancienne maison qui s’adosse au chemin communal, et qui déploie sa longue façade sud face à la vallée. Malgré ses atouts, la propriété présentait certains inconvénients pour les clients :

  • L’unique accès à la grange, future habitation d’une des deux familles, ne s’effectuait en l’état qu’en passant sous les fenêtres du bâtiment principal.
  • La rampe, avec ses matériaux et le garage édifié contre le pignon du bâtiment d’habitation, conférait un caractère assez routier et banalisant à la propriété. De plus, elle complexifiait l’accès aux espaces de jardin, et obstruait le panorama qui, bien que saisissant en l’état, pourrait englober le Mont Blanc à l’est.
  • Le mur de soutènement de la terrasse, s’il constituait une belle promenade, coupait toute communication entre l’habitation et les futurs espaces productifs, immédiatement en contrebas.
  • L’habitation existante, toute en longueur et mono-orientée au sud, n’offrait que peu de variété d’espace.

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À l’articulation des deux bâtiments, on perçoit bien comment le volume de la rampe d’accès bloquait la perspective à l’est, et comment la piscine existante, assez mal intégrée, renforçait la problématique d’intimité entre les deux familles.
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Un plan-masse général a d’abord permis de solutionner la question de l’intimité des espaces extérieurs en créant un nouvel accès à la propriété, à l’extrémité est de la parcelle, avec une nouvelle voie contournant les jardins jusqu’à la grange à rénover.

Ce faisant, l’ancienne rampe hors d’usage a pu être supprimée au profit d’une ouverture paysagère vers l’est et le Mont Blanc. C’est cette vue qui guide la restructuration du pignon est de la maison, avec la destruction du garage au profit d’une extension sur deux niveaux, sur la même emprise.
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Le secteur étant soumis à l’avis de l’ABF, le projet se veut respectueux du caractère des lieux et cherche, malgré la disparité des extensions successives du bâtiment, à trouver une forme d’unité et de simplicité : l’extension qui remplace le garage assume son ossature bois contemporaine mais trouve sa place sous un prolongement de toiture à l’identique de l’existant, comme cela s’observe dans le bâti local ; les ouvertures sont rectifiées et harmonisées, avec un rythme régulier souligné par des volets traditionnels ; une longue casquette végétalisée protège les baies du rez-de-jardin et se développe en pergola sur le pignon, soulignant le lien entre toutes les parties.

La liaison de tous les éléments est également recherchée dans l’aménagement paysager, en cohérence avec une approche permacole : l’ancienne piscine, transformée en citerne enterrée, recueille les eaux pluviales et alimente de manière gravitaire les jardins ; l’assainissement autonome par phyto-épuration contribue lui aussi à l’arrosage : une double rampe aménagée contre la terrasse relie la zone productive à l’habitation.
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Quant au bâtiment lui-même, sa rénovation avait pour objectif de le rendre très peu énergivore, et bien plus lumineux et ouvert sur son environnement immédiat.

L’isolation thermique se concentre sur la façade nord, très fermée, ainsi que sur les combles. La façade sud et la nouvelle façade est sont équipées de menuiseries bois/alu très performantes (André). Certaines baies élargies, et les baies d’angle de l’extension maximisent les apports solaires, tandis que volets bois, BSO et casquette végétalisée permettent de s’en protéger en saison chaude. Quelques nouvelles baies sont ouvertes au nord, dédiées à la ventilation naturelle traversante.

En complément aux apports passifs, à la régulation hygrométrique des matériaux naturels mis en œuvre à l’intérieur de la maison et à l’inertie des murs anciens, une ventilation double flux, de l’eau chaude sanitaire solaire et une chaudière bois fournissent les apports énergétiques « actifs » pour assurer le confort des habitants.

Ici le pragmatisme, rendu nécessaire par les nombreuses contraintes du programme et du lieu, associé à une approche patrimoniale et des ambitions écologiques, apportent finalement un  certain caractère romantique à l’architecture.

Mission réalisée : Avant-Projet (avec la collaboration de Cyril Baugé architecte), Permis de Construire – Chantier en cours, livraison 2022

Staglieno

Gênes, sur la côte ligure, est une ville étonnante. Loin du charme riant des grandes cités italiennes, c’est un romantisme chaotique, fait de confrontations et d’ambiguïtés, qui s’y exprime.

Son centre ancien, l’un des plus étendus et des plus denses d’Europe, apparaît comme un labyrinthe étroit, propice aux rencontres inattendues et aux chocs visuels.

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2-Genes rues

Mais l’un de ses lieux les plus étranges est l’immense cimetière de Staglieno, gigantesque miroir des vanités de la bourgeoisie génoise, qui épouse le relief montagneux selon la même stratégie que la ville toute proche.

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Une bicoque en Revermont

Le village de Ruffey-sur-Seille, à la limite de la Bresse et du Revermont jurassien, est une commune rurale assez dynamique, satellite du bassin de vie de Lons-le-Saunier.

http://lacousinadeaymonier.blog50.com/

A proximité de l’église et du vieux pont emblématiques du village, un groupe de constructions disparates occupe la berge entre la Seille et la rue qui lui est parallèle. Il s’agit vraisemblablement d’anciens bâtiments annexes aux fermes sises de l’autre côté de la rue. Parmi elles, une bicoque en appentis a fait l’objet d’aménagements disparates depuis l’après-guerre, dont un garage-atelier à l’emplacement du jardin et une véranda au sud, au-dessus de la rivière.

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Sur la route d’Evora…

La route nationale 18, dans l’Alentejo, au Portugal, traverse une plaine agricole aride, écrasée de soleil, sans la moindre parcelle d’ombre. Elle passe aujourd’hui sans s’arrêter devant un ancien abreuvoir pour le bétail. Deux murs, aux tracés rectangulaires et semi-circulaires emboîtés, définissent un enclos de maçonnerie partiellement ouvert sur la route.

Abreuvoir05 Lire la suite

Relevés et projets en bâti ancien

 

Parmi les types de projets sur lesquels je suis amené à travailler, les interventions sur le bâti ancien sont souvent les plus stimulantes. Faire avec un existant, en tirer le meilleur parti, valoriser son potentiel et s’émanciper de ses limites génèrent souvent des espaces uniques et originaux. On retrouve aussi cette satisfaction dans la construction neuve, quand on s’appuie sur le caractère du paysage environnant pour proposer des espaces situés.

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L’ancienne abbaye de Baume-les-Messieurs, dans le Jura, a longtemps été un support de choix pour approfondir ma connaissance du bâti ancien, ses techniques constructives, ses pathologies, et pour en saisir l’histoire et les évolutions.

Ces quelques images prennent pour sujet la cour du cloître, espace à l’évolution complexe, et dont les galeries couvertes ont disparu. Il s’agit d’abord de relevés, puis de propositions de restitution d’un état historique, et enfin d’une mise en valeur simple.

Baume Logis 01

Baume Logis 02

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La connaissance du bâti ancien, qu’il soit à caractère patrimonial ou plus modeste, trouve des prolongements naturels dans la réhabilitation, bien sûr, mais aussi dans la construction écologique où les matériaux et leurs comportements sont souvent proches.